Luther, Luther, Luther. Monsieur tout le monde, ou peut-être pas. Parce que de toute façon, nous sommes tous uniques à notre façon. Surtout au niveau du caractère. Avant tout, Luther est d'un calme quasi olympien. Parce que oui, à 44 ans, plus les années passent, et plus on devient ce que l'on peut appeler : un grand sage. Ne pas non plus dire, qu'il est un vieil homme à l'article de la mort, non. Mais, il a réussi à apprendre de ses erreurs, sans pour autant ne pas les recommencer. Toujours le sourire aux lèvres, celui-ci pourrait devenir lassant, et pourtant. Il se trouve être un pilier pour ceux qui sont comme lui, des cobayes. Comme des animaux, mis en cage. Il est un peu cette dose d'espérance, qui meurt, peu à peu chaque jour. Luther, c'est aussi un homme qui prend les choses comme elles viennent, il ne panique pas pour rien, mais, dieu qu'il réfléchi trop. Il se considère un peu comme philosophe de son temps, " Philosophes des années sombres " comme il aime le dire. Luther aura toujours la bouche ouverte, pour dire quelque chose de plus ou moins intéressant. Certes, il n'est pas gueulard, mais il a un certain répondant, il préférera l'ironie et le sarcasme, aux poings et à la saignante. Mais, il sait quand utiliser la force. Surtout quand on touche à sa fille adorée.Elle a quinze ans maintenant, et s'il continue à rester debout, c'est pour elle et personne d'autre. De toute manière, nous avons tous une raison qui nous pousse à rester debout. Un petit quelque chose, une étincelle, une pensée agréable. Sa pensée à lui, c'est cette boule d'énergie qui ne perd pas de répondant et d'optimisme. Luther, c'est aussi un homme rancunier, spécialiste des coups dans le dos, il n'hésitera pas à chercher des choses à ne pas savoir sur vous, et vous faire du mal, tellement mal. Les mots sont ses armes, sa seule façon de se défendre et il pense plutôt bien les utiliser.

Calme quasi olympien, ne veut pas dire accepter froidement ce que peuvent dire les autres. Quand c'est trop douloureux à porter, Luther s'enfermera dans une pièce, ou tentera de se retrouver seul. Puis, là, ce sera la bombe en pleine explosion. uc




Ici, tout est noir. Je suis là, au centre de ce vide, à attendre quelque chose, quelqu'un. Je marche, sans vraiment voir où je vais, sans savoir. De toute manière, la vie en elle même est comme ça, nous ne savons rien d'elle, alors qu'elle sait tout de nous. Prendre son courage à demain, s'enfoncer dans le noir. Un retour à l'état d'enfant, qui a peur du méchant monsieur qui se cache dans les ténèbres. Mon coeur claque fort, si fort. Il pourrait presque s'arracher de mon torse. Puis, quelque chose apparait, je ne sais trop quoi. Une tête, des cheveux. Un rire cristallin, qui sonne à mes oreilles, comme une mélodie que j'ai déjà connu. Quelque chose de familier, qui calme les âmes perdues. J'avance, je me rapproche, et là je sais. C'est elle. Elle se retourne, mais elle n'apparait pas. Ses yeux, sa bouche, son nez, rien. Je sais que c'est elle, mais son visage, je ne m'en souviens pas, plus. « Tu es en train de l'oublier, Luther. » Une voix lointaine, douce et calme. Toujours ce fichu rire qui claque contre les parois de ce noir, et elle s'éloigne. Petit à petit, je cours après, mais sans succès. Cette lumière s'étiole, disparait. Pourtant, je me souviens du jour où elle a apprit à marcher, avec précision, je revois son petit corps tomber au sol et réclamer les bras de quelqu'un. Je revois sa feuille, bourrée de bonnes notes. Mais, son visage est un flou. Comme un gros trou noir, une grosse tâche sur un visage qui ne mérite pas d'être souillé. « Tu es en train de l'oublier, Luther. » La panique, la peur. Mon coeur implose, autour de moi, toujours ce noir. Encore et encore. Et cette voix, répète sans cesse, que je l'oublie. De plus en plus fort, à un tel point que mes mains ne suffisent pas à m'aider à ne pas entendre. Un hurlement strident, suraigu.
Silence.

Sursaut. Mon corps se redresse d'un coup sec. Mes yeux sont exorbités, mon coeur n'arrive pas à suivre la cadence, il bat n'importe comment. Mes membres tremblent, je déglutis, passe une main dans mes cheveux. Je me lève de ce lit qui me servira de tombe. La lumière, celle de la lune, mais la lumière. Le silence, le lourd mais si bon silence. Je passe ma main sur mon torse, inspire un long moment. Cauchemar. Je regarde cette fenêtre. Une fenêtre, c'est signe de liberté, mais aussi, de prison. Mes mains glissent sur le verre glacé. C'est douloureux, de se dire qu'il n'y a aucun échappatoire. Et tu ne cesse de le répéter Luther. De toute manière, au lieu d'espérer, songe à te laisser mourir. Tu sais, ça peut t'aider. Je tire une grimace, voix intérieure, celle qui parle aux causes désespérées. Quand, de toute manière vous êtes à un stade où plus rien n'a d'importance. Sauf le visage de ta fille, et tu n'arrives même pas à t'en souvenir. SI. Enfin, non. Je pose mon dos contre le mur, je me laisse glisser et admire l'ombre de la fenêtre sur le sol. Mes mains passent dans mes cheveux. Je veux me souvenir, je veux me souvenir. J'entends sa voix, j'arrive à distinguer sa façon de marcher, ses vêtements, sa chevelure blonde. Mais son visage, c'est qu'une tâche Luther. Tu auras beau essayer, tu n'arriveras jamais à t'en souvenir. Oublier sa propre fille, oublier son visage, sa manière de sourire, ses yeux pétillants. J'ai mal, si mal. Dieu, si tu existes encore, abrège ma peine, mes maux. Son seul souvenir, me donne la force, et maintenant, je l'oubli. Elle disparait dans la pénombre, comme un spectre. Maëlane, reviens-moi.